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Les coopératives françaises devront innover pour rester dans la course européenne et mondiale

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« Arrêtons d’être masochistes : les coopératives ne sont pas ringardes » ! Mais attention à la compétition européenne et mondiale qui s’accélère et pour laquelle les coopératives françaises doivent pouvoir trouver de nouveaux moyens de financement pour rester dans la course. Voilà en résumé le message qui ressortait de la première journée européenne des coopératives qui se tenait le 28 septembre dernier. Organisé par Les Echos en partenariat avec Coop de France, PricewaterhouseCoopers et Crédit Agricole, ce colloque a fait ressortir les progrès réalisés ces dernières années par les coopératives agroalimentaires pour se moderniser, pour grossir aussi. A coup de rapprochements (création d’Elivia, numéro 2 de la viande, fusion d’Eurial et du GLAC, rapprochement Agrial et Elle&Vire, rachat en cours d’Entremont-Alliance par Sodiaal…), six coopératives font aujourd’hui partie du Top 20 des coopératives européennes, établi par PricewaterhouseCoopers : Terrena avec 3,5 milliards d’euros de CA, Tereos (3,4 milliards), Axéréal (2,8 milliards), Champagne Céréales (2,5 milliards), Sodiaal (2,5 milliards) et Agrial (2,2 milliards). Mais la course européenne et mondiale à la taille critique ne fait que s’amplifier, comme le soulignait notamment Philippe Duval, président du directoire de Tereos. Elles se retrouvent, entre autres, face à leurs « grandes sœurs » du nord de l’Europe, qui n’hésitent pas à s’endetter pour se développer à l’international comme Friesland Campina. Les groupes tricolores sous statut coopératif devront sans doute faire appel à des « moyens financiers qui ne sont pas dans leur ADN », estime Sébastien Murbach, présentant l’étude de PricewaterhouseCoopers sur les positions des coopératives françaises en Europe.

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De Ludovic Spiers, directeur général d’Agrial à Laurent Jubert, directeur général de Champagne Céréales, en passant par Philippe Duval, président du directoire de Tereos, tous les dirigeants de coopératives, présents le 28 septembre, s’attachaient à rappeler le chemin parcouru ces dernières années. Des années de consolidation qui ont vu le nombre de coopératives passer de 3200 en 2005 à 2600 (fin 2010). « Non les coopératives ne sont pas ringardes, témoignait, Ludovic Spiers, d’Agrial. Elles sont audacieuses, réactives et démontrent leur capacité de faire évoluer leur business model ».
Vues par les financiers, et notamment par les bailleurs de fonds traditionnels du secteur, c’est-à-dire le Crédit Agricole ou Unigrains, les structures coopératives disposent d’atouts solides pour attirer les capitaux : aussi bien leur taux de sinistre que leur indice de fiabilité si on les compare à ceux des entreprises privées classiques. Leurs fonds propres sont souvent plus importants et les risques liés à la transmission sont moindres. Reste que pour être à la hauteur des nouveaux défis de la mondialisation, les coopératives ont souvent du mal à mobilliser rapidement des moyens de financements adaptés. « Jusqu’à présent, la France n’a jamais mis en œuvre une fiscalité favorisant les investissements dans les filières coopératives », regrettait Philippe Mangin, président de Coop de France. Depuis des années, les agriculteurs ont été incités à investir dans du nouveau matériel, voire dans l’immobilier mais pas dans l’outil industriel. Or il y a de l’épargne mobilisable dans le monde agricole ! »
Le cas Yoplait, révélateur du défaut de taille critique des coopératives françaises
Le cas Yoplait, mis en vente par PAI Partners, pose clairement la problématique à laquelle les coopératives françaises sont confrontées, soulignait Sébastien Murbach, senior manager PricewaterhouseCoopers. « Qu’une coopérative se mette sur les rangs pour racheter la marque à “la petite fleur”, elle trouvera sur son chemin Arla, Lactalis, General Mills ainsi que des fonds d’investissement internationaux comme Permira, Axa Private Equity ou BC PArtners. La compétition sera forte et donc le prix élevé ». Autre exemple : comment faire face à des concurrents comme Monsanto ou Pioneer, qui investissent 1 milliard de dollars dans la R&D et nourissent des projets sur le blé génétiquement modifié quand on s’appelle Limagrain ? Le groupe coopératif de Clermont-Ferrand, spécialiste des semences à l’échelle mondiale ne parvient à mobiliser « que » 100 millions d’euros pour sa R&D.
De même, la concentration qui est en œuvre cette année dans le sucre (acquisitions réalisées par le groupe Louis Dreyfus et Bunge au Brésil, rachat de l’australien CSR par le singapourien Wilmar, abandon par Tate&Lyle de son activité sucrière cédée à American Sugar Refining…) relance la course à la taille critique. « De notre point de vue, il y a un changement colossal d’échelle ! », souligne Philippe Duval de Tereos. Dans un autre secteur, l’amidon, Tereos est numéro trois, mais c’est en Asie que se trouve le potentiel de croissance (+8% l’an)… Pour rester dans la course, le groupe, qui dispose d’un véhicule coté en Bourse (Tereos Internacional à Sao Paulo) ouvre de nouvelles voies. Sa filiale Tereos Internacional s’est alliée récemment au groupe pétrolier brésilien Petrobas Biocombustivel, pour accélérer le développement de Guarani, 4e producteur de sucre et 5e producteur d’éthanol au Brésil. L’accord entre les deux groupes prévoit que Petrobas investira 686 millions d’euros pour détenir au maximum 47 % du capital de Guarani. « Nous nous efforçons de garder la majorité du capital », note Philippe Duval. Mais sans moyens financiers, Tereos resterait sur la touche.
Encore loin derrière les leaders européens
« Certes, on a assisté ces deux dernières années à un rattrapage qui permet à 6 des coopératives françaises de figurer dans les 20 premières européennes. Il y a trois ans, elles étaient trois à prétendre être dans ce top 20 », note Sébastien Murbach. Ce mouvement de rattrapage s’explique par les investissements réalisés, par les rapprochements menés (voir encadré page suivante), mais aussi par la volatilité des matières premières agricoles, nombre de coopératives tricolores étant plus impliquées en amont que les coopératives européennes dans leur ensemble.
Mais on est encore loin du compte, si l’on ne se fie qu’au critère de taille. Le groupe des « six » (Terrena, Tereos, Axéréal, Champagne Céréales, Sodiaal et Agrial) (voir classement) se situe dans la tranche des 2,2 à 3,5 milliards d’euros de CA. Quand les leaders européens d’Europe du Nord et d’Allemagne, Vion, Friesland Campina, Arla, et Danish Crown… passent le cap des 6 milliards. La part de l’international dans leur chiffre d’affaires est plus élevée (voir tableau p. 24). Et la concurrence en termes de R&D et de logistique est de plus en plus forte.
En outre, une nouvelle phase est en train de s’ouvrir. Ces grandes coopératives hollandaises, danoises, ou allemandes, arrivent au bout de la logique de concentration sur leur territoire national.« Pour continuer à grandir, elles vont se tourner vers d’autres pays. Elles vont commencer à regarder vers la France , comme en témoigne l’intérêt manifesté par le laitier danois Arla pour Yoplait », note encore Sébastien Murbach.
Dans ce contexte, le modèle de financement « au fil de l’eau » des entreprises coopératives risque d’être insufisant. Il faut aller vite pour combler l’écart avec les leaders européens.
Ces derniers, à l’instar d’Arla ou de Danish Crown, hésitent moins à recourir à l’endettement pour financer leur croissance et se montrent plus agressifs. Leurs dettes peuvent représenter jusqu’à deux fois les fonds propres (Glanbia, Danish Crown,…). Elles ont plus « naturellement » recours aux investisseurs privés ou aux marchés financiers. Plusieurs coopératives sont ainsi cotées sur les places boursières comme l’allemang Südzucker ou encore les irlandais Glanbia ou Kerry (qui ne correspond plus guère, du reste, au modèle coopératif). « Aujourd’hui, la prise de risque est moindre en France », constate Sébastien Wurbach.
Pour PricewaterhouseCoopers, les grandes coopératives ne pourront pas se passer de réflechir à des moyens alternatifs de financement. Il existe déjà des démarches originales. Comme celle de Tereos, un des pionniers de l’internationalisation et de la recherche de capitaux. Ou encore de SICLAE Champagne Céréales et de 4 autres coopératives de l’Est de la France qui ont créé cette société à capitaux privé qui leur a permis de lever 100 millions d’euros (hors marché). Une démarche qui va plus loin que celle qui consiste à mettre en commun des actifs dans une filière donnée (lait,…). On assiste a une réelle prise de conscience des dirigeants d’entreprises coopératives, conclut Sébastien Murbach.

Claude Alpi, le 7 oct 2010 sur: http://www.agraalimentation.fr/les-cooperatives-francaises-devront-innover-pour-rester-dans-la-course-europeenne-et-mondiale-art283346-15.html

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